Rencontres cœur de ville. Châlons-en-Champagne en quête d'une stratégie commerciale

Stratégies urbaines
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Plusieurs dizaines de villes moyennes parties prenantes du plan Action cœur de ville sont venues, le 1er octobre à Arras, présenter stratégies et plans d’actions, 18 mois après le lancement du plan, et à l’occasion de la deuxième session des Rencontres coeur de ville (lire notre article). Qu’il s’agisse du commerce, de l’habitat, de l’action foncière, de l’espace public ou du numérique, les collectivités ont décrit, en ateliers, devant des représentants d’autres collectivités et de l’administration, un aspect particulier de leur politique de revitalisation du centre-ville. Benoist Apparu, maire (LR) de Châlons-en-Champagne, est venu expliquer les actions déjà menées et celles envisagées dans le cadre de la politique de soutien aux commerces du centre-ville.

Dans une ville où les commerces du centre ne détiennent que 12 % de parts de marché par rapport à la périphérie (là où "le taux moyen national est de 25 %"), développer une stratégie commerciale pour le centre est une nécessité. Le problème n’est pas nouveau et, dès 2014, au début du mandat de Benoist Apparu, "une action globale de revitalisation du centre a été lancée", explique le maire. Celle-ci impliquait "du marketing territorial, des rachats d’immeubles, un plan lumière, une politique du stationnement, etc.". 

En matière immobilière, la Semcha, Sem locale, a été orientée et outillée, à cette époque, pour acquérir et réhabiliter "ce type d’immeubles du centre que nous avons dans toutes nos villes moyennes", expose Benoist Apparu : "ces immeubles avec un rez-de-chaussée commercial qui vivote et des étages d’habitation à l’abandon". Dix-neuf immeubles ont été achetés à ce jour, dont six ont été réhabilités et sont sous gestion publique. Les rdc commerciaux ont été loués et fonctionnent. C’est ainsi que la Ville s’est aperçue qu’il y avait "une défaillance du système" : "un des commerçants – que nous avions installé dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt, en plus – a revendu son fonds de commerce deux ans après son installation, pour 250 000 €. Et la collectivité n’a pas touché un centime de cette création de valeur qu’elle a permise et pour laquelle elle a supporté un risque !" raconte, amer, l’édile. 

Recycler les financements engagés

D’où le lancement, il y a quelques mois, d’une deuxième phase, "non pas pour remplacer cette politique d’acquisition d’immeubles, mais pour la compléter". Pour prendre, également, la suite du Contrat de revitalisation des sites de défense (CRSD – "des sommes substantielles accordées par l’Etat aux perdants de la réorganisation des armées", comme l’explique le maire), qui prend fin en 2020, et avait permis un dispositif d’aides à l’installation des commerces.

Un cabinet d’études a été mandaté, il y a quelques mois, pour proposer un dispositif de solution à la création-reprise de fonds de commerce permettant un "recyclage des financements" engagés par la collectivité. Quatre scénarios s’offrent aux collectivités, explique son rapport : l’achat du fonds puis la mise en place d’un contrat de gérance avec le commerçant qui s’installe ; le co-investissement dans l’affaire ; le co-financement du projet ; enfin, la garantie de prêt.

Le bureau d’études conseille à la Ville de Châlons-en-Champagne d’exclure les deux premières solutions, trop lourdes juridiquement et porteuses de trop de risque. Et plaide pour un simple co-financement, combiné ou non à la garantie d’une partie du prêt, ayant identifié que l’un des problèmes pour les aspirants commerçants était la forte réticence des banques. Pour Benoist Apparu, qui semblait découvrir cette étude en même temps que l’auditoire, ce 1er octobre, c’est en revanche le co-investissement qui paraît le plus approprié à la situation châlonnaise, même s’il "présente des lourdeurs" ; en effet, il "donne plus la main à la collectivité pour éviter que la création de valeur ne lui échappe". 

Quoiqu’il en soit, explique Benoist Apparu, et quel que soit le dispositif finalement retenu – "rien n’est fixé, la discussion ne fait que commencer" -, l’édile souhaite éviter, à l’avenir, "la solution du subventionnement", à cause, outre l’absence de retour sur investissement, "d’un effet d’aubaine estimé à 80 % des installations".

Dax : contrepied absolu

Un responsable des services de la Ville et de l’Agglo de Dax (40), prenant la parole depuis le public, a expliqué que pour le centre-ville de la station thermale landaise, il avait, à l’inverse, été décidé d’agir sans Sem - "trop lourd à porter" -, et par subventions. Plus important, selon le responsable, un travail de "mise en relation des propriétaires et des commerçants ou futurs commerçants" a été entrepris, ce qui a nécessité d’aller chercher les propriétaires, "parfois très éloignés géographiquement et très peu au fait de la valeur marchande de leur bien". Pour cela, la collectivité a voté la taxe sur les locaux commerciaux vacants. "L’effet a été immédiat : les propriétaires sont venus nous voir et les prix ont baissé". 

Le maire de Châlons-en-Champagne n’a, de son côté, pas souhaité mettre cette taxe en place, considérant que "le problème d’attractivité du centre-ville n’est pas la faute des propriétaires ; il ne s’agit pas de les punir mais de les encourager à louer leur bien". Il a en revanche mis en place la possibilité de préempter des locaux, "à des fins de dissuasion, sans jamais l’avoir utilisée". 

L’atelier d’échanges aura de toute évidence permis aux participants de constater que si les situations locales impliquent des dispositifs très différents, il existe toute une palette d’actions à disposition des équipes municipales pour engager la revitalisation commerciale de leurs centres-villes en difficulté.

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