Comment bien construire en zone périurbaine ?

"La construction de logements ne peut se concevoir qu’en fonction de l’emploi", défend Patrick Ollier, président (LR) de la Métropole du Grand Paris. Pour Manuel Flam, directeur général du groupe SNI et président du directoire de Grand Paris Habitat, "sans transports collectifs à proximité", difficile de remplir les programmes sociaux ou intermédiaires. Le 21 avril, La Tribune et Le Journal du Grand Paris ont réuni élus et aménageurs autour d’une question complexe : "comment réussir la construction de logements en milieu périurbain ?" (cf. p. 1)
Car si la gestion du foncier ne pose pas autant de difficultés qu’en zone tendue, nombreux sont les autres défis auxquels sont confrontés les acteurs de l’aménagement pour construire dans cette "campagne métropolitaine" de la seconde couronne francilienne.

Les élus, d’abord, doivent convaincre des citoyens qui ne supportent plus que l’on construise à côté de chez eux. Jean-François Vigier, maire (UDI) de Bures-sur-Yvettes (91), peut en témoigner : l’hostilité des habitants à l’égard des nouvelles constructions "se renforce depuis quelques années". L’édile, qui se dit volontaire dans le développement de nouveaux programmes résidentiels, doit composer entre les normes quantitatives et impartiales de l’Etat (loi SRU) et la réalité du terrain. La mixité sociale prend du temps : "après de longs échanges avec les concitoyens" pour établir une programmation en cohérence avec leurs aspirations et les besoins réels, "l’Etat arrive, me dit que je suis en carence", et remet tout en cause. Jean-François Vigier regrette, par ailleurs, "les effets catastrophiques" de la loi Alur : "en supprimant les COS, nous avons ouvert la boîte de Pandore, donnant plus de droits à construire du collectif en zone pavillonnaire". Donc, plus de fil à retordre pour l’élu. L’autre composante de la construction de logement en périurbain est d’ordre économique. "L’économie du foncier de l’immobilier y est très différente", souligne Gilles Bouvelot, directeur général de l’Epfif. "Pour avoir des prix abordables, il faut construire dense, or en milieu détendu, ce n’est pas souvent le cas". Si la rénovation de dentelle dans les dents creuses des centres-bourgs est un véritable enjeu, il est plus aisé de faire du neuf sur des terrains nus, explique l’aménageur. "Techniquement" et d’un point de fiscal aussi, "c’est plus facile". "Dans ces zones, les projets sont moins importants quantitativement certes, mais nécessitent plus de monde autour de la table", conclut-il.

En zone périurbaine, un marché existe bel et bien. Il serait plus subtil qu’il n’y paraît à en croire Aude Debreil, directrice générale de l’EPA Sénart. "Oui, le marché existe, mais il faut le connaître", pour comprendre par exemple les subtilités des dix communes de l’agglomération de Sénart, insiste la dirigeante. "Il y a la TOL, le PLH certes, mais il ne faut pas oublier la réalité du marché, les segments, les aspirations ces citoyens, les flux démographiques… Sans parler du marché secondaire de la maison individuelle avec lequel il faut trouver un équilibre économique". Car la marge de manœuvre est faible en secteur périurbain. Là, où "les loyers des PLS tutoient ceux du marché", "nous sommes à 30 € près", confirme Manuel Flam. "Les élus nous disent que leurs administrés veulent des grands appartements, mais si c’est trop cher, il n’y aura pas de locataire. Il faut du compact". Stratégie approuvée par Hervé Puybouffat, président de Tagerim Promotion : "il ne faut pas hésiter à densifier près des gares" – ou futures gares -, "quitte à dédensifier après. Il faut du mutable". Le promoteur se dit confiant, et est convaincu qu’il existe assez d’outils en Ile-de-France pour faire des logements de qualité et abordables, à conditions de stabiliser les dispositifs d’aide actuels qui fonctionnent bien, comme le Pinel ou le PTZ, pour préserver la dynamique enclenchée depuis 2015. (JS)

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